Recueillies des Memoires de feu Maistre
Michel Nostradamus, vivant Medecin du
Roy Charles IX, et l'un des plus excellens
Astronomes qui furent iamais.
Presenté au tres grand Invincible et tres
clement Prince Henri IIII, vivant Roy de
France et de Navarre.
Par Vincent Seve de Beaucaire en Languedoc, des
le 19. Mars, 1605, au Chasteau de Chantilly, maison
de Monseigneur le Connestable.
(Ces prophéties avaient été remises à ce Vincent
Seve par Henry Nostradamus, neveu du prophète.)
PREDICTIONS
I
SIECLE nouveau, alliance nouvelle,
Un Marquisat mis dedans la nacelle,
A qui plus fort des deux l'emportera:
D'un Duc, d'un Roy, gallere de Florence,
Port à Marseille, pucelle dans la France,
De Catherine fort chef on rasera.
II
Que d'or, d'argent fera despendre,
Quand Comte voudra ville prendre,
Tant de mille et mille soldats,
Tuez, noyez, sans y rien faire,
Dans plus forte mettra pied terre,
Pigmée ayde des Censuarts.
III
La ville sans dessus dessous,
Renversee de mille coups
De canons: et forts dessous terre:
Cinq ans tiendra: le tout remis,
Et laschee à ses ennemis
L'eau leur fera la guerre.
IV
D'un rond, d'un lis, naistra un si grand Prince,
Bien tost et tard venu dans sa province,
Saturne en Libra en exaltation:
Maison de Venus en descroissante force,
Dame en apres masculin soubs l'escorse,
Pour maintenir l'heureux sang de Bourbon
V
Celuy qui la Principauté
Tiendra par grande cruauté,
A la fin verra grand phalange:
Par coup de feu tres dangereux,
Par accord pourroit faire mieux,
Autrement boira suc d'Orange.
VI
Quand de Robin la traistreuse entreprise
Mettra Seigneurs et en peine un grand Prince,
Sceu par ia Fin, chef on lui trenchera:
La plume auvent, amye dans l'Espaigne,
Poste attrapé estant en la campagne,
Et l'escrivain dans l'eauë se iettera.
VII
La sangsue au loup se ioindra,
Lors qu'en mer le bled defaudra,
Mais le grand Prince sans envie,
Par ambassade luy donra
De son bled, pour luy donner vie,
Pour un besoin s'en pourvoira.
VIII
Un peu devant l'ouvert commerce
Ambassadeur viendra de Perse,
Nouvelle au franc pays porter:
Mais non receu, vaine esperance,
A son grand Dieu sera l'offense,
Feignant de le vouloir quitter.
IX
Deux estendars du costé de l'Auvergne,
Sennestre pris, pour un temps prison regue,
Et une Dame enfans voudra mener:
Au Censuari, mais descouvert sur la terre,
Danger de mort murmure sur la terre,
Germain, Bastille frere et soeur prisonnier.
X
Ambassadeur pour une Dame,
A son vaisseau mettra la rame,
Pour prier le grand medecin:
Que de l'oster de telle peine,
Mais en ce s'opposera Royne
Grand peine avant qu'en veoir la fin.
XI
Durant ce siecle on vera deux ruisseaux,
Tout un terroir inonder de leurs eaux,
Et submerger par ruisseaux et fontaines:
Coups et Moufrin Beccoyran, et ales
Par le gardon bien souvent travaillez,
Six cens et quatre alez, et trente moines.
XII
Six cens et cinq tres grand'nouvelle,
De deux Seigneurs la grand querelle,
Proche de Genaudan sera,
A une Eglise apres l'offrande
Meurtre commis, prestre demandè
Tremblant de peur se sauvera.
XIII
L'aventurier six cens et six ou neuf,
Sera surpris par fiel mis dans un oeuf,
Et peu apres sera hors de puissance
Par le puissant Empereur general,
Qu'au monde n'est un pareil ny esgal,
Dont un chacun luy rend obeissance.
XIV
Au grand siege encor grands forfaits,
Recommençant plus que iamais
Six cens et cinq sur la verdure,
La prise et reprise sera,
Soldats ès champs iusqu'en froidure
Puis apres recommencera.
XV
Nouveau esleu patron du grand vaisseau,
Verra long temps briller le cler flambeau
Qui sert de lampe à ce grand territoire,
Et auquel temps armez sous son nom,
Ioinctes à celles de l'heureux de Bourbon
Levant, Ponant, et Couchant sa memoire.
XVI
En Octobre six cens et cinq,
Pourvoyeur du monstre marin,
Prendra du souverain le cresme
Ou en six cens et six, en Iuin,
Grand'ioye aux grands et au commun
Grands faits apres ce grand baptesme.
XVII
Au mesme temps un grand endurera,
Ioyeux mal sain, l'an complet ne verra,
Et quelques uns qui seront de la feste,
Feste pour un seulement, à ce iour,
Mais peu apres sans faire long seiour,
Deux se donront, l'un l'autre de la teste.
XVIII
Considerant la triste Philomelle
Qu'en pleurs et cris sa peine renouvelle,
Raccourcissant par tel moyen ses iours,
Six cens et cinq, elle en verra l'issue,
De son tourment, ia la toile tissue,
Par son moyen fenestre aura secours.
XIX
Six cens et cinq, six cens et six et sept,
Nous montrera iusques l'an dix sept,
Du boutefeu lire, hayne et envie,
Soubz l'olivier d'assez long temps caché,
Le Crocodil sur la terre a caché,
Ce qui estoit mort, sera pour lors en vie.
XX
Celuy qui à par plusieurs fois
Tenu la cage et puis les bois,
R'entre à son premier estre
Vie sauve peu apres sortir,
Ne se sçachant encor cognoistre,
Cherchera subiect pour mourir.
XXI
L'autheur des maux commencera regner
En l'an six cens et sept sams espargner
Tous les subiets qui sont à la sangsue,
Et puis apres s'en viendra peu à peu,
Au franc pays r'allumer son feu,
S'en retournant d'où elle est yssue.
XXII
Cil qui dira, descouvrissant l'affaire,
Comme du mort, la mort pourra bien faire
Coups de poignard par un qu'auront induit,
Sa fin sera pis qu'il n'aura fait faire
La fin conduit les hommes sur la terre,
Gueté partout, tant le iour que la nuit.
XXIII
Quand la grand nef, la proüe et gouvernail,
Du franc pays et son esprit vital,
D'escueils et flots par la mer secoüee,
Six cens et sept, et dix coeurs assiegé,
Et des reflus de son corps affligé,
Sa vie estant sur ce mal renoüee.
XXIV
Le Mercurial non de trop longue vie,
Six cens et huit et vingt, grand maladie,
Et encor pis danger de feu et d'eau,
Son grand amy lors luy sera contraire,
De tels hazards se pourroit bien distraire,
Mais bref, le fer luy fera son tombeau.
XXV
Six cens et six, six cens et neuf,
Un Chancelier gros comme un boeuf,
Vieux comme le Phoenix du monde,
En ce terroir plus ne luyra,
De la nef d'oubly passera
Aux champs Elisiens faire ronde.
XXVI
Deux freres seront de l'ordre Ecclesiastique,
Dont l'un prendra pour la France la pique,
Encor un coup, si l'an six cens et six
N'est affligé d'une grand'maladie,
Les armes en main iusque six cens et dix,
Cuieres plus loing ne s'estendant sa vie.
XXVII
Celeste feu du côté d'Occident,
Et du Midy, courir iusques au Levant,
Veds demy morts sans point trouver racine
Troisiesme aage, à Mars le Belliqueux,
Des Escarboucles on verra briller feux,
Aage Escarboucle, et à la fin famine.
XXVIII
L'an mil six cens et neuf ou quatorziesme,
Le vieux Charon fera Pasques en Caresme,
Six cens et six, par escrit le mettra
Le Medecin, de tout cecy s'estonne,
A mesme temps assigné en personne
Mais pour certain l'un d'eux comparoistra.
XXIX
Le Griffon se peut apprester
Pour à l'ennemy resister
Et renforcer bien son armee,
Autrement 'Elephant viendra
Qui d'un abord le surprendra,
Six cens et huict, mer enflammee.
XXX
Dans peu de temps le Medecin du grand mal,
Et la sangseuë d'ordre et rang inegal,
Mettront le feu à la branche d'Olive,
Poste courir, d'un et autre costé,
Et par tel feu leur Empire accosté,
Se r'alumant du franc finy salive.
XXXI
Celuy qui a, les hazards surmonté,
Qui fer, feu, eauë, n'a iamais redouté,
Et du pays bien proche du Basacle,
D'un coup de fer tout le monde estonné,
Par Crocodil estrangement donné,
Peuple ravi de veoir un tel spectacle.
XXXII
Vin à foison, tres-bon pour les gendarmes,
Pleurs et soupirs, plainctes cris et alarmes
Le Ciel fera ses tonnerres pleuvoir
Feu, eau et sang, le tout meslé ensemble,
Le Ciel de sol, en fremit et en tremble,
Vivant n'a evu ce qu'il pourra bien veoir.
XXXIII
Bien peu apres sera tres-grand misere,
Du peu de bed, qui sera sur la terre,
Du Dauphiné, Provence et Viverois,
Au Vivaeois est un pauvre presage,
Pere du fils, sera anthropophage,
Et mangeront racine et gland du bois.
XXXIV
Princes et Seigneurs tous se feront la guerre,
Cousin germain, le frere avec le frere,
Finy l'Arby de l'heureux de Bourbon,
De Hierusalem les Princes tant aymables,
Du fait commis enorme et execrable,
Se ressentiront sur la bourse sans fond.
XXXV
Dame par mort grandement attristee,
Mère et tutrice au sang qui l'a quittee,
Dame et Seigneurs, faits enfans orphelins,
Par les aspics et par les Crocodilles,
Seront surpris forts Bourgs, Chasteaux et Villes
Dieu tout puissant les garde des malins.
XXXVI
La grand rumeur qui sera par la France,
Les impuissants voudront avoir puissance,
Langue emmiellee et vrays Cameleons,
De boute-feux, allumeurs de chandelles,
Pyes et geys, rapporteurs de nouvelles
Dont la morsure semblera Scorpions.
XXXVII
Foible et puissant seront en grand discord,
Plusieurs mourront avant faire l'accord
Foible au puissant vainqueur se fera dire,
Le plus puissant au ieune cedera,
Et le plus vieux des deux decedera,
Lors que l'un d'eux emvahira l'Empire.
XXXVIII
Par eaue, et par fer, et par grande maladie,
Le pourvoyeur à l'hazard de sa vie
Sçaura combien vaut le quintal du bois,
Six cens et quinze, ou de dixneufiesme,
On gravera d'un grand Prince cinquiesme
L'immortel nom, sur le pied de la Croix.
XXXIX
Le pourvoyeur du monstre sans pareil,
Se fera veoir ainsi que le Soleil,
Montant le long la ligne Meridienne,
En poursuivant l'Elephant et le loup,
Nul empereur ne fit iamais tel coup,
Et rien plus pis à ce Prince n'advienne.
XL
Ce qu'en vivant le pere n'avoit sçeu,
Il acquerra ou par fer, ou par feu,
Et combattra la sangsue irritee,
Ou iouyra de son bien paternel
Et favory du grand Dieu Eternel,
Aura bien tost sa province héritee.
XLI
Vaisseaux galleres avec leur estendar,
S'entrebattront pres du mont Gilbattar,
Et lors sera fors fait à Pampelonne,
Qui pour son bien souffrira mille maux,
Par plusieurs fois soustiendra les assaux,
Mais à la fin unie à la Couronne.
XLII
La grand'Cité où est le premier homme,
Bien amplement la ville ie vous nomme,
Tout en alarme, et le soldat és champs
Par fer et eaue, grandement affligee,
Et à la fin, des François soulagee,
Mais ce sera des six cens et dix ans.
XLIII
Le petit coing, provinces mutinees,
Par forts Chasteaux se verront dominees,
Encor un coup par la gent militaire,
Dans bref seront fortement assiegez,
Mais ils seront d'un tres grand soulagez,
Qui aura fait entree dans Beaucaire.
XLV
De coup de fer, tout le monde estonné
Par Crocodil estrangement donné
A un bien grand, parent de la sangsuë,
Et peu apres sera un autre coup
De guet à pend, commis contre le loup,
Et de tels faits on en verra l'issuë.
XLVI
Le pourvoyeur mettra tout en desroutte,
Sangsuë et loup, en mon dire n'escoutte
Quand Mars sera au signe du Moulon
Ioint à Saturne, et Saturne à la Lune,
Alors ce sera ta plus grande infortune,
Soleil lors en exaltation.
XLVII
Le grand d'Hongrie, ira dans la nacelle,
Le nouveau né, fera guerre nouvelle
A son voisin qu'il tiendra assiegé,
Et le noireau avec son altesse,
Ne souffrira, que par trop on le presse,
Durant trois ans ses gens tiendra rangé.
XLVIII
Du vieux Charon on verra le Phoenix,
Estre premier et dernier de ses fils,
Reluire en France, et d'un chacun aymable,
Regner long temps, avec tous les honneurs
Qu'auront iamais eu ses predecesseurs
Dont il rendra sa gloire memorable.
XLIX
Venus et Sol, Iupiter et Mercure
Augmenteront le genre de nature
Grande alliance en France se fera,
Et du Midy la sangsue de mesme,
Le feu esteint par ce remede extreme,
En terre ferme Olivier plantera.
L
Un peu devant ou apres l'Angleterre
Par mort de loup, mise aussi bas que terre,
Verra le feu resister contre l'eaue,
Le r'alumant avecques telle force
Du sang humain, dessus l'humaine escorce
Faite de pain, bondance de cousteau.
LI
La ville qu'avoit en ses ans
Combatu l'injure du temps,
Qui de son vainqueur tient la vie,
Celuy qui premier l'a surprist,
Que peu apres François reprist,
Par combats encor affoiblie.
LII
La grand Cité qui n'a pain qu'à demy,
Encor un coup la sainct Barthelemy
Engravera au profond de son ame,
Nismes, Rochelle, Geneve et Montpellier,
Castre, Lyon, Mars entrant au Belier,
S'entrebarrtont le tout pour une Dame.
LIII
Pusieurs mourront avant que Phoenix meure,
Iusque six cens septante est sa demeure,
Passé quinze ans, vingt et un, trente neuf,
Le premier est subiet à maladie,
Et le second au fer, danger de vie,
Au feu à l'eau, est subiect trante neuf.
LIV
Six cens et quinze, vingt, Grand Dame mourra
Et peu apres un fort long temps plouvra,
Plusieurs pays, Flandres et l'Angleterre
Seront par fer et par feu affligez,
De leurs voisins longuement assiegez,
Contraints seront de leur faire la guerre.
LV
Un peu devant ou apres tres grand'Dame
Son ame au Ciel, et son corps soubs la lame,
De plusieurs gens regrettee sera,
Tous ses parents seront en grand'tristesse,
Pleurs et soupirs d'une Dame en ieunesse,
Et à deux grands, le dueil delaissera.
LVI
Tost l'Elephant de toutes parts verra
Quand pourvoyeur au Griffon se ioindra,
Sa ruine proche, et Mars qui touiours gronde
Fera grands faits aupres de terre saincie
Grands estendards sur la terre et sur l'onde,
Si la nef n'a esté de deux freres enceinte.
LVII
Peu apres l'aliance faite,
Avant solemniser la feste,
L'Empereur le tout troublera
Et la nouvelle mariee
Au franc pays par fort liee,
Dans peu de temps apres mourra.
LVIII
Sangsuë en peu de temps mourra,
Sa mort bon signe nous donra,
Pour l'accroissement de la France,
Alliances se trouveront
Deux grands Royaumes se ioidront,
François aura sur eux puissance.